Chaque chose a son propriétaire (ça resterait encore à prouver que ce soit nécessaire pour un Etat de droit… mais admettons). Une portion de la terre est-elle une chose ? Si je possède un livre, je peux en faire ce que je veux, y compris le détruire (abusus). Si je possède une terre, je peux uniquement l'utiliser (usus) et bénéficier de ses fruits (fructus). Ce n'est donc pas une pleine propriété.
La différence est plus ténue que vous ne le pensez. D'une part, il y a parfaitement moyen d'abuser d'une terre ("qui chaule sa terre sans l'engraisser se ruine sans y penser", par exemple
)
Mais le droit de propriété est de plus en plus restreint à tous les niveaux, par des lois que l'on peut qualifier "de circonstance" plutôt que d'intelligence ....
- brûler des billets de banque est un délit, même s'ils sont à vous ;
- laisser pourrir une maison est un délit, même si elle est à vous ;
- abandonner une voiture rouillée qui vous appartient sur un terrain qui est votre propriété peut constituer un délit ;
Etc, etc.
Mais revenons à nos moutons, tu cites la pluie et le vent comme n'appartenant à personne. Je pourrais aussi parler de l'air et des cours d'eau et bien sûr de l'être humain. Non, tout n'a pas un propriétaire. Il ne va pas de soi que qu'il doit toujours y avoir un propriétaire de quoi que ce soit.
Si. A part ces éléments naturels, tout doit avoir un propriétaire pour avoir un "responsable".
Je pensais avoir été clair que quand je demandais une justification, je voulais savoir comment il pouvait être légitime que quelqu'un soit propriétaire du sol. (Ça me semblait clair dans le premier message où j'en parlais, ainsi que dans le dernier où je parlais de légitimité dans la phrase précédente.)
L'homme est un animal territorial. Mais il n'est pas le seul, et donc on peut considérer qu'un "sol" a différents propriétaires territoriaux : un rouge-gorge, par exemple, "possède un territoire" et le garde jalousement, au point de laisser migrer sa dame de coeur pour des vacances sudistes en hiver, mais de rester pour garder les lieux ...
Et de rentrer dans les plumes de tout autre rouge-gorge qui voudrait pénétrer "chez lui". ..
En fait exception pour quelques races nomades comme certains singes, la territorialité (et donc la propriété de fait) est une règle générale ...
Toi tu me donnes des justifications comme quoi la propriété de la terre serait plus efficace (ce qui se discute, voir plus bas). Ça ne la rend pas plus légitime. On pourrait aussi discuter longuement pour savoir si la propriété des êtres humains (l'esclavage) est plus efficace ou pas. Il y a eu des théories visant à prouver l'un et l'autre…
Prenons un fondement de la propriété, qui est le travail.
Initialement, quelques êtres en voie d'humanisation déambulaient sur des terres "libres" mais qui ne servaient à rien pour sa survie, à part la chasse, la pêche et la cueillette. Certains de ses hommes se sont mis à défricher un lopin de terre, à l'amender par brûlis, à le cultiver. Un gros gros travail !
Devaient-ils, à l'heure de la récolte, laisser quelques nomades "communistes", qui n'avaient rien foutu, venir profiter du fruit de leur travail ?
Dans les autres cas de propriété, la légitimité vient du fait que j'ai produit moi-même ce dont je suis propriétaire ou que je l'ai acheté à quelqu'un qui l'a produite ou qui l'a lui même acheté à quelqu'un qui… etc.
Oui. c'est pareil pour une terre. Quand tu longes un champ, dis-toi qu'il représente des siècles de travail sans discontinuer.
En bref, soit on achète au propriétaire précédent (ou on hérite du propriétaire précédent), soit on est le premier propriétaire. Dans la plupart des cas on voit aisément comment on peut être légitimement le premier propriétaire. Dans le cas de la terre, ça me semble beaucoup plus compliqué.
Non, c'est au contraire bien plus limpide, et la traçabilité des propriétaires et de leurs moyens d'acquisition s'étend sur des millénaires : la transmission de la terre est le premier type de contrat notarié.
Remarquons que tu centres le débat sur la terre agricole alors que le débat était parti du logement et donc principalement des terrains bâtis (ou à bâtir). Soit.
Sur le terrain bâti, il existe des alternatives à la propriété "éternelle". Aux USA, par exemple, la plupart des terrains appartiennent à l'Eta, mais sont concédés sous forme d'emphytéotes : toutes les annonces ou presque mentionnent, à côté du prix, le nombre d'années encore disponibles "joli bungalow 3 chambres, xxx $, 43 ans" ... C'est la raison pour laquelle les maisons US sont souvent construites de manière assez précaire.
Ça peut même être plus de 10 ans pour certaines cultures. Tu parles de "bail à ferme" donc tu reconnais toi-même qu'il ne faut pas absolument être propriétaire mais qu'il suffit de bénéficier d'une assurance de ne pas investir "pour rien".
Cette assurance ne peut venir que d'un contrat irrévocable (ou difficilement révocable) entre le preneur et le bailleur. C'est donc le propriétaire (public ou privé) qui seul peut garantir l'usage à l'exploitant.
Tiens, en fait, ton argument pourrait être utilisé pour critiquer le capitalisme. Quelqu'un qui est propriétaire de ses moyens de production sera plus efficace que quelqu'un qui est juste salarié.
Oui pour ta seconde phrase. Ceci dit, être propriétaire, c'est sot bêcher soi-même, soit veiller à ce que ce soit bien bêché par un salarié
Tu crois pas que c'est plutôt (principalement) parce que l'URSS a massivement déporté de la main d'œuvre agricole pour développer son industrie ?
Non. L'industrialisation agricole permettait ce déport de main d'oeuvre sans attenter au rendement des cultures. Ce qui a tout mis par terre, ce sont les "plan quinquennaux" élaborés par des fonctionnaires qui avaient plus d'autorité que d'obligations de résultats ou de connaissances. et le dégoût des ceux qui ont dû suivre leurs consignes au mépris de tout bon sens et de toute tradition agricole. Bref, plus personne ne s'est investi.
Etaient-ils propriétaires de leur petits lopins ? Autrement dit avaient-ils le droit de les revendre ?
C'est en effet l'époque de transition où la propriété a été restaurée, les petites terres restituées à leurs aciens propriétaires, lequels ont recommencé à les cultiver ou les on soit louées, soit vendues.
PS: T'inquiètes, je répondrai aux autres messages aussi. Patience…