mauvais signe...

mauvais signe...

Gros remue-ménage hier soir. En deux minutes, on est passé d'une ville calme (et pour cause) à un champ de bataille, avec des tirs dans tous les sens. Ca tiraillait un peu dans tous les quartiers. Impossible de comprendre de quoi il retournait.

Pendant une bonne demi-heure j'ai écouté un bulldozer démolir une maison.

J'ai beau retourner le problème dans tous les sens, je ne réussis pas à trouver un atome de justification pour cette pratique là. C'est comme si l'humanité n'avait rien appris.

"Oui, mais les terroristes... ?". Oui, les terroristes. Je sais.

La différence, c'est que l'attentat terroriste est le fait d'un tout petit groupe, une cellule de gens motivés par un mélange de haine, de pas trop d'intelligence, peut-être un zeste de conviction religieuse, et que personne n'a de contrôle sur eux. Je suis persuadé qu'à chaque attentat, il y a tout au plus une dizaine de personnes impliquées, soit parce qu'elles le préparent, soit parce qu'on le leur annonce pour le revendiquer. Une poignée de fanatiques meurtriers.

Face à cette poignée de dingues, le rempart du monde moderne et éclairé, le dernier bouclier contre l'intégrisme religieux, la démocratie incarnée, les valeurs des droits de l'homme... en un seul mot Israël. Israël et ses méthodes de l'homme des cavernes. Tu me lances un caillou, je te lance un plus gros caillou. Tu recommences ? Je te lance cinq plus gros cailloux. Et puis je vire ta mère, ton petit frère, je rase la maison. Et puis celle des voisins. Il n'avaient qu'à pas habiter là. Et puis pour faire bonne mesure, j'interdis à tes gamins d'aller à l'école. Je fais fermer les boutiques de ta ville. Je détruis les rues, les feux rouges, je tire dans toutes les poubelles, je casse les vitres. Je t'interdis d'aller travailler. J'interdis aux camions de livraison de venir chez toi. Plus de fruits, de légumes, de lait, plus de pain. J'installe mes soldats dans ta maison. Ils piquent des trucs ? Prouve-le. Ils cassent des trucs ? Ben c'est la vie mon gars... Et puis je ne veux pas savoir pourquoi tu m'as lancé ce caillou pour commencer. Et non, je ne suis pas chez toi. Dieu me l'a dit. C'est toi qui es chez moi. Plus pour longtemps.

Et qui nous tient ce discours ? Est-ce le discours d'un petit groupe de dingues fanatiques religieux limite fascistes animés par la haine ? (Ceux qui pensent à Effie Eitam ont un peu raison, mais ce n'est pas la bonne réponse...). Non. C'est le discours d'un état constitué, d'une démocratie en bonne et due forme, avec élections, liberté de la presse, et tout le tremblement. Juste, ils sont dirigés par un petit groupe de dingues fanatiques religieux limite fascistes animés par la haine. Et ça, c'est absolument autorisé. Démocratique. Le processus est respecté !

Prenez Arafat... son gouvernement est corrompu, tout le monde le sait. Ses copains se partagent le pognon. Ce n'est pas le cas du gouvernement israélien. Bon, évidemment, si on regarde le budget entre les lignes, on s'apperçoit qu'une partie non négligeable de la galette part, directement ou par des moyens détournés, dans les colonies, habitées par les copains du gouvernement. Mais c'est pas pareil !! C'est légal ! La forme est respectée !

Ce respect de la forme permet au monde entier de regarder de l'autre côté, de fustiger les sauvages barbares qui se font exploser dans les villes israéliennes (ce qu'ils sont...) et d'anoner par réflexe le droit des Israéliens à se défendre... contre des gens qu'ils oppriment depuis 35 ans.

Et même quand on en arrive à l'arme absolue, le mur de huit mètres autour de la maison pour empêcher les cailloux de passer, on trouve encore normal que ce mur soit construit chez le voisin, sur des terres qu'on lui vole, alors qu'on dynamite les maisons, rase les oliviers, retourne les champs.

Au nom de la forme. La démocratie-poudre-aux-yeux à l'état pur, avec des citoyens de seconde, et même troisième classe. Il y a une partie de la population israélienne qui se débat dans des "villes de développement", et qui se voit attribuer trois fois moins de crédits budgétaires que les colons qui bénéficient en plus des lignes budgétaires d'un nombre de privilèges incroyables. Comme celui de pouvoir casser de l'arabe sous le nez des soldats qui applaudissent. Alors que dans les villes de développement on tire la langue pour donner à manger à tout le monde, dans les colonies on a des piscines dans les jardins. Et ce sont ces mêmes colonies qui génèrent et entretiennent les affrontements avec les Palestiniens, entraînant une hausse des crédits militaires et... une baisse des crédits pour les villes de développement. Pas de bol, hein... ?

C'est au nom de ces valeurs là qu'on détruit aujourd'hui les maisons des gens qui ont fait un attentat il y a quatorze mois (c'est arrivé avant-hier). Peut-être que ces gens ont réfléchi, peut-être qu'ils sont devenus des porte-parole de la non-violence, en quatorze mois de deuil... on s'en fout. Boum. Et puis il n'y étaient pour rien, ils ont appris la mort du fils, du frère, à la télé... on s'en fout. Boum. Et puis le fils en question, il avait vu mourir son frère d'une balle en pleine tête pour rien, sur un caprice de soldat... on s'en fout. Boum.

L'injustice élevée au rang de système, d'arme. La violence aveugle instrumentalisée par une poignée de fanatiques violents, limite fascistes, voire carrément fascistes, animés par la haine. C'est le rempart du monde libre contre la barbarie islamique.

Si je devais résumer ça d'une seule image, il me revient à l'esprit une conversation téléphonique que j'ai eue avec P., un jour d'avril. P. était dans un convoi humanitaire qui amenait de la nourriture à Naplouse. Elle me disait : "ça se passe bien, sur la route, il y a des colons qui nous font de grands signes !". Et comme elle se marrait, je lui demande : "quoi, comme signe ?". Et elle me répond : "ils font le signe de nous trancher la gorge...".

Si je devais résumer ça d'une seule image, il me revient à l'esprit une conversation téléphonique que j'ai eue avec P., un jour d'avril. P. était dans un convoi humanitaire qui amenait de la nourriture à Naplouse. Elle me disait : "ça se passe bien, sur la route, il y a des colons qui nous font de grands signes !". Et comme elle se marrait, je lui demande : "quoi, comme signe ?". Et elle me répond : "ils font le signe de nous trancher la gorge...".