L'opposition victorieuse cherche à s'unir au Pakistan
19.02.08 | 18h45
Par Augustine Anthony
ISLAMABAD (Reuters) - L'opposition au président pakistanais Pervez Musharraf a largement remporté les élections législatives de lundi au Pakistan et va tenter de former un gouvernement de coalition qui jetterait un voile d'incertitude sur l'avenir du chef de l'Etat.
Le Parti du peuple pakistanais (PPP) de l'ancien Premier ministre Benazir Bhutto, assassinée fin décembre, devient le premier parti du pays mais ne dispose pas de la majorité absolue au parlement.
Arrive ensuite une deuxième formation d'opposition, la Ligue musulmane (PML-N) d'un autre ancien chef de gouvernement, Nawaz Sharif, qui avait été renversé par Musharraf en 1999.
A eux deux, ces partis seraient majoritaires parmi les 342 élus du parlement, selon des résultats officieux. Le grand perdant est le parti qui soutenait Musharraf, la Ligue musulmane PML-Q, qui n'arrive qu'en troisième position.
Aussitôt les résultats connus, le veuf de Benazir Bhutto, qui pris les rênes du PPP, a invité la PML-N à former une alliance de gouvernement.
"En tant que plus grande force politique du pays, nous exigeons que nous soit confiée la tâche de former le gouvernement", a dit Asif Ali Zardari lors d'une conférence de presse à Islamabad.
"Pour le moment, la décision du parti est que nous ne sommes pas intéressés par tous ceux qui ont à voir avec l'ancien gouvernement", a-t-il ajouté, soulignant qu'il allait en revanche tenter de convaincre Sharif de former avec son parti une coalition.
Une idée qui ne semblerait pas déplaire à Sharif, qui a lancé de son côté un appel à "l'union de toutes les forces démocratiques" pour "dire un adieu définitif à la dictature".
"M. Musharraf n'a pas voulu comprendre. Il a fermé les yeux. Il a dit qu'il partirait quand le peuple le lui demanderait. Aujourd'hui le peuple lui demande de partir", a-t-il lancé lors d'une conférence de presse à Lahore, précisant qu'il voulait rencontrer Zardari.
Alors que moins de vingt sièges restaient à attribuer, à 20h45 (15h45 GMT), les résultats officieux sur 261 sièges en donnaient 87 au PPP, 67 à la PML-N de Nawaz et seulement 38 à la PML-Q des amis de Musharraf.
"L'HEURE DE VERITE"
De petits partis et des indépendants se partagent les autres sièges.
Soixante-dix sièges réservés à des femmes et à des minorités religieuses seront attribués à la proportionnelle selon les résultats de chaque parti.
Dans la très troublée Province du Nord-Ouest, où les islamistes l'avaient emporté en 2002, c'est un groupe nationaliste pachtoune qui arrive en tête.
Le porte-parole de la PML-Q a reconnu la défaite de son parti mais n'a pas exclu de rejoindre un gouvernement de coalition - hypothèse qu'a déjà rejetée Zardari.
"De toute évidence, la Nation s'est exprimée. Nous n'avons pas réussi à convaincre, le peuple a rejeté notre politique et nous acceptons son verdict", a dit Tariq Azim Khan à Reuters.
"Dans l'intérêt du pays, nous voulons coopérer et travailler avec tout le monde, sans exclusive", a-t-il ajouté.
Des groupes de partisans de l'opposition ont laissé éclater leur joie dans les rues de plusieurs villes du pays, notamment à Lahore et Rawalpindi.
Les politologues attribuent l'échec des partisans de Musharraf tant à l'impopularité du chef de l'Etat qu'aux difficultés économiques - inflation notamment - et aux problèmes de la vie quotidienne - difficultés de ravitaillement, coupures de courant, sans oublier le choc provoqué par l'assassinat de Benazir Bhutto le 27 décembre.
La Bourse de Karachi a bien réagi aux résultats du scrutin et a gagné 3%.
Selon Asif Ali Zardari, 20 personnes, dont 15 partisans du PPP, ont été tuées lundi dans des violences politiques. Mais aucun attentat majeur n'a été signalé.
La participation au scrutin a été d'environ 35%.
Un parlement hostile à Musharraf cherchera probablement à obtenir le départ du chef de l'Etat.
"C'est l'heure de vérité pour le président", juge Abbas Nasir, rédacteur en chef du journal Dawn. "Ça doit bouillonner dans sa tête, il doit se demander s'il peut travailler avec deux partis dont il avait forcé les dirigeants à l'exil."
De plus en plus isolé, Musharraf avait autorisé Benazir Bhutto à rentrer de huit années d'exil en octobre dernier. Un mois plus tard, c'était Sharif qui retrouvait son pays - mais ne pouvait se présenter aux élections.
La disparition brutale de Benazir Bhutto avait conduit au report de ces élections législatives et provinciales, d'abord programmées le 8 janvier.
A Washington, la Maison blanche a souhaité que le Pakistan continue à être un allié dans sa lutte contre le terrorisme.
Le département d'Etat a salué dans ces élections un progrès vers le plein rétablissement de la démocratie et a invité toutes les parties à en accepter les résultats et à travailler ensemble.
Avec Zeeshan Haider, Faisal Aziz et Sahar Ahmed, version française Guy Kerivel
http://www.lemonde.fr/web/depeches/0,14-0,39-34379622@7-37,0.html
19.02.08 | 18h45
Par Augustine Anthony
ISLAMABAD (Reuters) - L'opposition au président pakistanais Pervez Musharraf a largement remporté les élections législatives de lundi au Pakistan et va tenter de former un gouvernement de coalition qui jetterait un voile d'incertitude sur l'avenir du chef de l'Etat.
Le Parti du peuple pakistanais (PPP) de l'ancien Premier ministre Benazir Bhutto, assassinée fin décembre, devient le premier parti du pays mais ne dispose pas de la majorité absolue au parlement.
Arrive ensuite une deuxième formation d'opposition, la Ligue musulmane (PML-N) d'un autre ancien chef de gouvernement, Nawaz Sharif, qui avait été renversé par Musharraf en 1999.
A eux deux, ces partis seraient majoritaires parmi les 342 élus du parlement, selon des résultats officieux. Le grand perdant est le parti qui soutenait Musharraf, la Ligue musulmane PML-Q, qui n'arrive qu'en troisième position.
Aussitôt les résultats connus, le veuf de Benazir Bhutto, qui pris les rênes du PPP, a invité la PML-N à former une alliance de gouvernement.
"En tant que plus grande force politique du pays, nous exigeons que nous soit confiée la tâche de former le gouvernement", a dit Asif Ali Zardari lors d'une conférence de presse à Islamabad.
"Pour le moment, la décision du parti est que nous ne sommes pas intéressés par tous ceux qui ont à voir avec l'ancien gouvernement", a-t-il ajouté, soulignant qu'il allait en revanche tenter de convaincre Sharif de former avec son parti une coalition.
Une idée qui ne semblerait pas déplaire à Sharif, qui a lancé de son côté un appel à "l'union de toutes les forces démocratiques" pour "dire un adieu définitif à la dictature".
"M. Musharraf n'a pas voulu comprendre. Il a fermé les yeux. Il a dit qu'il partirait quand le peuple le lui demanderait. Aujourd'hui le peuple lui demande de partir", a-t-il lancé lors d'une conférence de presse à Lahore, précisant qu'il voulait rencontrer Zardari.
Alors que moins de vingt sièges restaient à attribuer, à 20h45 (15h45 GMT), les résultats officieux sur 261 sièges en donnaient 87 au PPP, 67 à la PML-N de Nawaz et seulement 38 à la PML-Q des amis de Musharraf.
"L'HEURE DE VERITE"
De petits partis et des indépendants se partagent les autres sièges.
Soixante-dix sièges réservés à des femmes et à des minorités religieuses seront attribués à la proportionnelle selon les résultats de chaque parti.
Dans la très troublée Province du Nord-Ouest, où les islamistes l'avaient emporté en 2002, c'est un groupe nationaliste pachtoune qui arrive en tête.
Le porte-parole de la PML-Q a reconnu la défaite de son parti mais n'a pas exclu de rejoindre un gouvernement de coalition - hypothèse qu'a déjà rejetée Zardari.
"De toute évidence, la Nation s'est exprimée. Nous n'avons pas réussi à convaincre, le peuple a rejeté notre politique et nous acceptons son verdict", a dit Tariq Azim Khan à Reuters.
"Dans l'intérêt du pays, nous voulons coopérer et travailler avec tout le monde, sans exclusive", a-t-il ajouté.
Des groupes de partisans de l'opposition ont laissé éclater leur joie dans les rues de plusieurs villes du pays, notamment à Lahore et Rawalpindi.
Les politologues attribuent l'échec des partisans de Musharraf tant à l'impopularité du chef de l'Etat qu'aux difficultés économiques - inflation notamment - et aux problèmes de la vie quotidienne - difficultés de ravitaillement, coupures de courant, sans oublier le choc provoqué par l'assassinat de Benazir Bhutto le 27 décembre.
La Bourse de Karachi a bien réagi aux résultats du scrutin et a gagné 3%.
Selon Asif Ali Zardari, 20 personnes, dont 15 partisans du PPP, ont été tuées lundi dans des violences politiques. Mais aucun attentat majeur n'a été signalé.
La participation au scrutin a été d'environ 35%.
Un parlement hostile à Musharraf cherchera probablement à obtenir le départ du chef de l'Etat.
"C'est l'heure de vérité pour le président", juge Abbas Nasir, rédacteur en chef du journal Dawn. "Ça doit bouillonner dans sa tête, il doit se demander s'il peut travailler avec deux partis dont il avait forcé les dirigeants à l'exil."
De plus en plus isolé, Musharraf avait autorisé Benazir Bhutto à rentrer de huit années d'exil en octobre dernier. Un mois plus tard, c'était Sharif qui retrouvait son pays - mais ne pouvait se présenter aux élections.
La disparition brutale de Benazir Bhutto avait conduit au report de ces élections législatives et provinciales, d'abord programmées le 8 janvier.
A Washington, la Maison blanche a souhaité que le Pakistan continue à être un allié dans sa lutte contre le terrorisme.
Le département d'Etat a salué dans ces élections un progrès vers le plein rétablissement de la démocratie et a invité toutes les parties à en accepter les résultats et à travailler ensemble.
Avec Zeeshan Haider, Faisal Aziz et Sahar Ahmed, version française Guy Kerivel
http://www.lemonde.fr/web/depeches/0,14-0,39-34379622@7-37,0.html
