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    Turquie : quand les islamistes font du business

    silverbold
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    Message  silverbold Sam 21 Juil - 7:32

    Turquie : quand les islamistes font du business
    A quatre jours des élections législatives, l’AKP au pouvoir joue la carte de la prospérité.
    Par Marc Semo
    QUOTIDIEN : mercredi 18 juillet 2007

    C’est le milieu de l’après-midi mais les rues d’Hacilar sont vides. Alors que dans les petites villes d’Anatolie, les chômeurs tuent normalement le temps en traînant dans les cafés, dans cette banlieue de la grande ville de Kayseri, on travaille et le soir on se couche tôt. «Ici le travail est un acte de foi. Mourir dans un accident de voiture en allant à l’usine c’est devenir un martyr assuré du paradis», explique avec humour Ahmet Herdem, le maire AKP (Parti de la justice et du développement, issu du mouvement islamiste) de cette bourgade industrielle. «Nos valeurs sont la famille et le travail, puis réinvestir l’argent ou le partager avec ceux qui ont eu moins de chance», renchérit Mehmet Ozhaseki. Pilier de l’AKP, le parti au pouvoir, et maire du «grand Kayseri» (un million d’habitants), il a été réélu pour la troisième fois consécutive avec 70 % des voix à la tête de ce symbole des «tigres anatoliens», ces petites villes en plein boom économique de la Turquie profonde.

    Enfant du pays. Espace verts et beaux immeubles modernes alignés se succèdent sur les larges avenues tirées au cordeau au pied du volcan Ercyes. A l’entrée de la ville, des panneaux électoraux de l’AKP pour le scrutin du 22 juillet clament simplement : «Kayseri vous souhaite la bienvenue !» Pas besoin d’en dire plus. D’autant qu’on y voit, au premier plan, l’enfant du pays, Abdullah Gül, ministre des Affaires étrangères, bras droit du premier ministre Recep Tayyip Erdogan, qui l’appelle «son frère». «La victoire de l’AKP aux législatives de 2002 était une révolution sociale avec l’arrivée au pouvoir de cette bourgeoisie anatolienne, conservatrice, voire bigote et industrieuse, qui s’affirme aux dépens des vieilles élites républicaines», analyse le politologue Soli Ozel. «Les gens d’ici se sentent enfin représentés par un parti avec des leaders à leur image», se félicite le maire.
    «La pression des islamistes est constante pour imposer petit à petit mais de façon implacable leurs valeurs», s’indigne Ismail Ulusoy, laïcard convaincu et ani­mateur de l’association pour la défense de la pensée d’Atatürk. Impossible de boire une bière en ville sinon dans quelques rares bars d’hôtels. Depuis des années, la mairie n’accorde plus de licence de vente d’alcool. Les supermarchés, à l’exception d’un seul - appartenant à un groupe étranger - n’en vendent plus. Alors, on boit chez soi. Bon nombre des villes bastions islamistes du pays sont en tête pour la consommation de raki. Hypocrisie ? «Kayseri vote avant tout utile, elle est islamiste comme jadis elle avait massivement soutenu la droite libérale», ironise Sevik Kulkuloglu, industriel du matelas et candidat pour le CHP, le parti de la gauche «kémaliste». L’important est la stabilité pour que les affaires tournent bien.
    Tradition mercantile. Quelque 750 usines s’alignent dans la zone industrielle de 25 millions de mètres carrés. «Nous en avons inauguré 193 en une seule journée de juin 2003, en présence du Premier ministre qui voulait montrer que le pays reprenait confiance», raconte fièrement Nurredin Okandan, vice-président de la chambre d’industrie. Comme nombre de ses pairs, il a repris le petit atelier familial plutôt que de faire de longues études. Il en a fait une prospère entreprise de fabrication de verre industriel.
    Dans cette cité d’antique tradition mercantile, on a le «business» dans le sang. Sur les 100 hommes d’affaire les plus riches de Turquie, une bonne vingtaine sont originaires de Kayseri ou de sa région. Un récent rapport de l’ESI (European Initiative Stability), un think-tank allemand, a évoqué «un calvinisme islamiste» à propos de l’éthique du travail de cette ville qui s’arrête presque totalement les vendredis lors de la grande prière.
    Les dirigeants de l’AKP ont fait de la ville un laboratoire politique. «Etre debout et avancer sans tout attendre de l’Etat», résume le maire Mehmet Ozhaseki pour énoncer les principes de ce qui veut être «un modèle» de bonne gestion sociale pour le reste du pays. Les industriels mettent la main à la poche pour les œuvres sociales. A l’occasion, les autorités locales n’hésitent pas à faire pression pour leur rappeler ce devoir de tout bon musulman. Quelque 16 000 repas sont ainsi servis quotidiennement aux familles les plus pauvres, la plupart des émigrants venus de l’extrême est du pays. «Un seul repas par jour sauf pour les cas sociaux les plus graves car nous ne voulons pas favoriser la fainéantise», précise Mehmet Ali Karcioglu, responsable d’une œuvre sociale revendiquant que «personne ne puisse dire qu’il n’a pas eu de quoi manger et où dormir». Tous les rouages du pouvoir ont été pris en main. «Le maire a l’oreille d’Ankara et son mot à dire sur toutes les nominations des hauts fonctionnaires», accuse Halil Karaçavus, patron de la grande usine de sucre, 1 500 ouvriers, bastion kémaliste depuis un demi-siècle, soulignant «qu’ils ont tout essayé pour en prendre le contrôle, y compris l’emploi de la force publique pour bloquer une assemblée d’actionnaires».
    Libéralisme. Cependant, l’omniprésence de l’AKP comme son affairisme commencent aussi à lasser. «Nul ne peut nier qu’ils font beaucoup, mais cela leur rapporte encore plus ainsi qu’aux hommes d’affaires qui leur sont proches», accuse Ikbal Cardaroglu, ancienne présidente de la commission des femmes de l’AKP. Elle ne porte pas le foulard et le parti la mettait en avant pour afficher son libéralisme. Le désenchantement fut rapide. Elle soupire : «Les femmes sans foulard servent de vitrine, mais ce sont les autres qui font réellement carrière ; ce sont des hypocrites qui abusent de la religion.»

    http://www.liberation.fr/actualite/monde/267650.FR.php

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