Mission délicate pour Javier Solana à Damas
De notre correspondante à Bruxelles ALEXANDRINE BOUILHET . Publié le 14 mars 2007Actualisé le 14 mars 2007 : 06h00
PROCHE-ORIENT Un accord secret viserait à épargner à la famille du président Bachar al-Assad les poursuites d'un tribunal international, après l'assassinat de l'ancien premier ministre libanais Rafic Hariri.
EN VISITE aujourd'hui à Damas pour une rencontre longtemps attendue avec le président Bachar al-Assad, le chef de la diplomatie européenne n'a pas une mission facile. Le mandat de Javier Solana est signé par 27 États membres, dont la France, qui, à la surprise générale, a accepté, dès avant le départ du président Jacques Chirac de l'Élysée, de lever son veto antisyrien. Dans un tel contexte, la marge de manoeuvre du haut représentant pour la politique étrangère de l'Union reste étroite. « La France le surveille de très près ! » convient-on à Bruxelles. « Sur le fond, il n'est pas question de modifier d'un iota la politique européenne », affirme un diplomate européen.
Sur la forme, cependant, le régime syrien a marqué un point : ce sont les Européens qui font le premier pas, aujourd'hui, alors que Damas n'a encore fait aucune concession. « Je compte parler franchement au président Assad », a indiqué Javier Solana, depuis Beyrouth, où il a entamé sa tournée moyen-orientale lundi. « L'indépendance du Liban est, à nos yeux, un élément de stabilité très important dans la région », a-t-il ajouté.
Centrée sur la souveraineté du Liban et l'instauration d'un tribunal international pour juger les assassins de Rafic Hariri, la liste des exigences européennes à l'égard de la Syrie est longue, fondée sur différentes résolutions de l'ONU. Mais pour convaincre Damas de s'y associer, Bruxelles ne dispose que de maigres « carottes », comme la reprise d'un accord d'association entre la Syrie et l'UE, gelé en 2004. « C'est toute la difficulté de la mission de Solana, convient-on à Bruxelles. Quel intérêt aurait la Syrie à céder aux exigences européennes maintenant, alors qu'elle est plutôt en position de force dans la région ? »
La réponse à cette question réside dans le détail des propositions présentées par Javier Solana. Depuis le retrait de l'armée syrienne du Liban, en 2005, la mesure la plus attendue par les Européens et les Libanais, et la plus visible, serait la mise en place rapide du tribunal pour juger les assassins de Rafic Hariri.
Les Syriens multiplient les obstacles
Sans reconnaître la légitimité de ce tribunal, les Syriens coopèrent avec zèle à l'enquête du juge Serge Brammertz, mandaté par l'ONU. « Les commissions rogatoires sont exécutées le jour même ! » raconte un familier de l'enquête. L'attitude syrienne est plus butée lorsqu'il s'agit de définir le statut du tribunal et son délai de mise en place. Peu pressés, les Syriens multiplient les obstacles. Ils exigent, par exemple, que ce soit leur droit pénal qui s'applique et non le droit international.
Ces tracasseries dissimulent une crainte de voir s'asseoir dans le box des accusés un membre de la famille du président Bachar al-Assad, comme son beau-frère, soupçonné par les enquêteurs d'être le « cerveau » de l'opération Hariri. Pour amadouer les Syriens, les Chancelleries occidentales seraient tombées d'accord, en secret, pour que le futur tribunal s'abstienne de juger la famille du président syrien. Cette forme d'impunité risque de ne pas être acceptée par tous les Libanais.
lien
De notre correspondante à Bruxelles ALEXANDRINE BOUILHET . Publié le 14 mars 2007Actualisé le 14 mars 2007 : 06h00
PROCHE-ORIENT Un accord secret viserait à épargner à la famille du président Bachar al-Assad les poursuites d'un tribunal international, après l'assassinat de l'ancien premier ministre libanais Rafic Hariri.
EN VISITE aujourd'hui à Damas pour une rencontre longtemps attendue avec le président Bachar al-Assad, le chef de la diplomatie européenne n'a pas une mission facile. Le mandat de Javier Solana est signé par 27 États membres, dont la France, qui, à la surprise générale, a accepté, dès avant le départ du président Jacques Chirac de l'Élysée, de lever son veto antisyrien. Dans un tel contexte, la marge de manoeuvre du haut représentant pour la politique étrangère de l'Union reste étroite. « La France le surveille de très près ! » convient-on à Bruxelles. « Sur le fond, il n'est pas question de modifier d'un iota la politique européenne », affirme un diplomate européen.
Sur la forme, cependant, le régime syrien a marqué un point : ce sont les Européens qui font le premier pas, aujourd'hui, alors que Damas n'a encore fait aucune concession. « Je compte parler franchement au président Assad », a indiqué Javier Solana, depuis Beyrouth, où il a entamé sa tournée moyen-orientale lundi. « L'indépendance du Liban est, à nos yeux, un élément de stabilité très important dans la région », a-t-il ajouté.
Centrée sur la souveraineté du Liban et l'instauration d'un tribunal international pour juger les assassins de Rafic Hariri, la liste des exigences européennes à l'égard de la Syrie est longue, fondée sur différentes résolutions de l'ONU. Mais pour convaincre Damas de s'y associer, Bruxelles ne dispose que de maigres « carottes », comme la reprise d'un accord d'association entre la Syrie et l'UE, gelé en 2004. « C'est toute la difficulté de la mission de Solana, convient-on à Bruxelles. Quel intérêt aurait la Syrie à céder aux exigences européennes maintenant, alors qu'elle est plutôt en position de force dans la région ? »
La réponse à cette question réside dans le détail des propositions présentées par Javier Solana. Depuis le retrait de l'armée syrienne du Liban, en 2005, la mesure la plus attendue par les Européens et les Libanais, et la plus visible, serait la mise en place rapide du tribunal pour juger les assassins de Rafic Hariri.
Les Syriens multiplient les obstacles
Sans reconnaître la légitimité de ce tribunal, les Syriens coopèrent avec zèle à l'enquête du juge Serge Brammertz, mandaté par l'ONU. « Les commissions rogatoires sont exécutées le jour même ! » raconte un familier de l'enquête. L'attitude syrienne est plus butée lorsqu'il s'agit de définir le statut du tribunal et son délai de mise en place. Peu pressés, les Syriens multiplient les obstacles. Ils exigent, par exemple, que ce soit leur droit pénal qui s'applique et non le droit international.
Ces tracasseries dissimulent une crainte de voir s'asseoir dans le box des accusés un membre de la famille du président Bachar al-Assad, comme son beau-frère, soupçonné par les enquêteurs d'être le « cerveau » de l'opération Hariri. Pour amadouer les Syriens, les Chancelleries occidentales seraient tombées d'accord, en secret, pour que le futur tribunal s'abstienne de juger la famille du président syrien. Cette forme d'impunité risque de ne pas être acceptée par tous les Libanais.
lien
