La fuite vers Damas
Talia Bouchouareb
Plongés par la guerre dans un dénuement total, 1 million d’Irakiens ont trouvé un refuge précaire en Syrie. L’ONU s’alarme de leur situation
En Irak, la vie est devenue impossible. Je n’y retournerai pas. Mon mari a échappé de peu à un attentat. Ici, la vie est dure, mais au moins je n’ai plus peur pour mes enfants !» Manal fait partie du million d’Irakiens réfugiés en Syrie. En août 2005, en pleine nuit, des hommes armés ont investi son immeuble. C’est à la suite de cette attaque qu’elle a décidé de quitter son pays. Comme nombre de ses compatriotes, elle s’est installée à Jaramana, au sud de Damas.
1 Irakien sur 8
Près de 2 millions d’Irakiens ont fui leur pays depuis son invasion, en 2003. Selon les estimations de l’ONU, la moitié d’entre eux se sont installés en Syrie, 750 000 en Jordanie et 150 000 en Egypte. Par ailleurs, l’Irak compte 1,8 million de personnes déplacées. Au total, selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, 1 Irakien sur 8 a été contraint de s’enfuir de chez lui.Les Etats-Unis n’avaient jusqu’ici accueilli que 500 de ces réfugiés sur leur territoire. Ils ont promis de faire un effort et de délivrer des visas, au cours des prochains mois, à 7 000 d’entre eux.
Cette paisible petite commune de banlieue a subitement gonflé, sous l’afflux des réfugiés. Ceux-ci, presque tous sans emploi, puisque dépourvus de permis de travail, vivent en général dans des conditions pénibles, souvent dramatiques. «La plupart ont tout abandonné, d’autres ont vendu tout ce qu’ils avaient pour venir ici, explique sœur Antoinette, de l’association Caritas. Des jeunes femmes, dont certaines sont encore des enfants, sont poussées à se prostituer. C’est une catastrophe sociale.»
A plusieurs reprises, l’ONU a tiré la sonnette d’alarme, appelant la communauté internationale à soutenir la Syrie et la Jordanie, dont les infrastructures, de santé ou d’éducation, peinent à supporter la pression de ces arrivées massives. «Nous sommes confrontés à une véritable crise, affirme Dietrun Gunther, représentant à Damas du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Jusqu’à présent, nos efforts portaient en priorité sur la situation à l’intérieur de l’Irak, mais nous devons maintenant prendre aussi en compte la situation des pays qui, comme la Syrie et la Jordanie, accueillent les réfugiés depuis le début de la guerre. Il faut soutenir leur générosité.»
Rares sont les réfugiés qui souhaitent rester
Après avoir envisagé de modifier les textes qui réglementent l’immigration, les autorités syriennes ont promis qu’aucun Irakien ne serait reconduit de force à la frontière. Mais les Damascènes redoutent les conséquences de cet afflux. «Ils doivent tous repartir chez eux. Les loyers ont doublé, même le prix des légumes a augmenté», se plaint un client, dans une boulangerie. Une inquiétude largement partagée, que relaie également la presse, qui y voit un argument supplémentaire pour dénoncer le maintien en Irak de «troupes d’occupation» américaines et britanniques.
La plupart des réfugiés irakiens ne souhaitent cependant pas rester en Syrie. Les ambassades occidentales croulent sous les demandes de visa. Parmi les postulants, nombreux sont ceux qui espèrent rejoindre des parents déjà installés en Australie, en Amérique ou en Europe. C’est le cas de Daoud, un homme d’affaires irakien arrivé en 2004 : «J’attends mon visa pour l’Australie, dit-il. J’ai deux frères là-bas. Je ne peux pas travailler ici pour un salaire de misère dont un Syrien ne voudrait pas. En Irak, j’avais des terres, un restaurant à Bagdad. Il faudra repartir de zéro, mais je préfère ça à la mort.»
http://www.lexpress.fr/info/monde/dossier/irak2/dossier.asp?ida=457107
Talia Bouchouareb
Plongés par la guerre dans un dénuement total, 1 million d’Irakiens ont trouvé un refuge précaire en Syrie. L’ONU s’alarme de leur situation
En Irak, la vie est devenue impossible. Je n’y retournerai pas. Mon mari a échappé de peu à un attentat. Ici, la vie est dure, mais au moins je n’ai plus peur pour mes enfants !» Manal fait partie du million d’Irakiens réfugiés en Syrie. En août 2005, en pleine nuit, des hommes armés ont investi son immeuble. C’est à la suite de cette attaque qu’elle a décidé de quitter son pays. Comme nombre de ses compatriotes, elle s’est installée à Jaramana, au sud de Damas.
1 Irakien sur 8
Près de 2 millions d’Irakiens ont fui leur pays depuis son invasion, en 2003. Selon les estimations de l’ONU, la moitié d’entre eux se sont installés en Syrie, 750 000 en Jordanie et 150 000 en Egypte. Par ailleurs, l’Irak compte 1,8 million de personnes déplacées. Au total, selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, 1 Irakien sur 8 a été contraint de s’enfuir de chez lui.Les Etats-Unis n’avaient jusqu’ici accueilli que 500 de ces réfugiés sur leur territoire. Ils ont promis de faire un effort et de délivrer des visas, au cours des prochains mois, à 7 000 d’entre eux.
Cette paisible petite commune de banlieue a subitement gonflé, sous l’afflux des réfugiés. Ceux-ci, presque tous sans emploi, puisque dépourvus de permis de travail, vivent en général dans des conditions pénibles, souvent dramatiques. «La plupart ont tout abandonné, d’autres ont vendu tout ce qu’ils avaient pour venir ici, explique sœur Antoinette, de l’association Caritas. Des jeunes femmes, dont certaines sont encore des enfants, sont poussées à se prostituer. C’est une catastrophe sociale.»
A plusieurs reprises, l’ONU a tiré la sonnette d’alarme, appelant la communauté internationale à soutenir la Syrie et la Jordanie, dont les infrastructures, de santé ou d’éducation, peinent à supporter la pression de ces arrivées massives. «Nous sommes confrontés à une véritable crise, affirme Dietrun Gunther, représentant à Damas du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Jusqu’à présent, nos efforts portaient en priorité sur la situation à l’intérieur de l’Irak, mais nous devons maintenant prendre aussi en compte la situation des pays qui, comme la Syrie et la Jordanie, accueillent les réfugiés depuis le début de la guerre. Il faut soutenir leur générosité.»
Rares sont les réfugiés qui souhaitent rester
Après avoir envisagé de modifier les textes qui réglementent l’immigration, les autorités syriennes ont promis qu’aucun Irakien ne serait reconduit de force à la frontière. Mais les Damascènes redoutent les conséquences de cet afflux. «Ils doivent tous repartir chez eux. Les loyers ont doublé, même le prix des légumes a augmenté», se plaint un client, dans une boulangerie. Une inquiétude largement partagée, que relaie également la presse, qui y voit un argument supplémentaire pour dénoncer le maintien en Irak de «troupes d’occupation» américaines et britanniques.
La plupart des réfugiés irakiens ne souhaitent cependant pas rester en Syrie. Les ambassades occidentales croulent sous les demandes de visa. Parmi les postulants, nombreux sont ceux qui espèrent rejoindre des parents déjà installés en Australie, en Amérique ou en Europe. C’est le cas de Daoud, un homme d’affaires irakien arrivé en 2004 : «J’attends mon visa pour l’Australie, dit-il. J’ai deux frères là-bas. Je ne peux pas travailler ici pour un salaire de misère dont un Syrien ne voudrait pas. En Irak, j’avais des terres, un restaurant à Bagdad. Il faudra repartir de zéro, mais je préfère ça à la mort.»
http://www.lexpress.fr/info/monde/dossier/irak2/dossier.asp?ida=457107