La démission de cinq ministres chiites ravive la crise au Liban
PAYS DU CÈDRE Le Liban est de nouveau plongé dans une crise politique, provoquée par la mise en place d’un tribunal international sur l’affaire Hariri: cinq ministres chiites ont démissionné avec fracas.
GABY NASR BEYROUTH
Publié le 13 novembre 2006
EPA- ATTENTAT: L’assassinat de Rafic Hariri, le 14 février 2005, refait des vagues au Liban. La mise en place d’un tribunal international pour juger les auteurs de l’attaque contre l’ancien premier ministre, dans laquelle Syriens et Libanais sont mis en cause, a plongé hier le pays dans une nouvelle crise politique.
Coup de théâtre politique au Liban, où les ministres chiites viennent de claquer la porte du gouvernement. Leur démarche a suivi de peu l'échec du dernier round de concertations visant à former un cabinet d'union nationale, au sein duquel le Hezbollah, soutenu par Damas et Téhéran, entendait accroître son influence. Officiellement, les ministres chiites se plaignent d'être marginalisés à l'intérieur du gouvernement dominé par les forces anti-syriennes, mais leur départ a de plus en plus du mal à cacher des motifs beaucoup moins avouables.
Les frondeurs sont cinq sur vingt-quatre ministres: deux sont affiliés au Hezbollah, deux autres au mouvement modéré Amal du président du Parlement Nabih Berri. Le cinquième ministre chiite, celui des Affaires étrangères, est quant à lui proche du Hezbollah.
Les ministres démissionnaires accusent la majorité de ne pas vouloir partager le pouvoir et exigent d'avoir une minorité de blocage au sein du gouvernement. La majorité parlementaire ne veut pas en entendre parler. D'abord pour une question de principe parce qu'elle estime avoir largement remporté les élections de mai/juin 2005; ensuite parce qu'elle soupçonne ses détracteurs d'avoir un agenda caché, à savoir: torpiller la création par l'ONU d'un tribunal international, chargé de juger les assassins de l'ancien Premier ministre Rafic Hariri.
La dernière mouture du projet onusien vient d'ailleurs d'être soumise aux autorités libanaises. L'opposition, en disposant d'une minorité de blocage, serait en position d'empêcher la création de ce tribunal, qui doit être approuvée par le gouvernement. Certains responsables syriens et leurs alliés libanais ayant été mis en cause dans l'assassinat de Rafic Hariri par une commission de l'ONU, la majorité voit derrière la manœuvre du Hezbollah une tentative de protéger le régime de Damas et de ramener la Syrie sur la scène politique libanaise.
Dialogue interrompu
Comme pour confirmer ces appréhensions, le dialogue interlibanais s'était brusquement interrompu samedi lorsque le Premier ministre, Fouad Siniora, soutenu par la majorité anti-syrienne, a insisté pour soumettre dès lundi en conseil des ministres le projet final de l'ONU sur la création du tribunal international. Le chef de l'Etat, Émile Lahoud, un pro syrien notoire, a refusé de participer à la séance de lundi. Selon lui, «le gouvernement a perdu sa légitimité constitutionnelle et de ce fait, toute réunion du cabinet est anticonstitutionnelle et sans valeur». En tout état de cause, cette situation plonge le Liban dans un véritable casse-tête constitutionnel. Théoriquement, Fouad Siniora peut passer outre à la démission des ministres chiites, puisqu'il dispose en conseil des ministres de la majorité des deux tiers nécessaires à l'approbation du document onusien. Toutefois, dans une démocratie consensuelle à la libanaise, il ne peut continuer à gouverner sans la participation des représentants d'une des principales communautés du pays. Or les chiites constituent environ le tiers de la population libanaise et le Hezbollah et ses alliés du mouvement Amal monopolisent leur représentation politique. Sans oublier que l'influence du «parti de Dieu» s'est considérablement accrue à la suite de la guerre avec Israël l'été dernier.
Pour l'heure, le Premier ministre refuse d'accepter la démission des ministres chiites, mais il n'en reste pas moins que le Liban se retrouve plongé à nouveau dans une grave crise politique.
http://www.24heures.ch/vqhome/le_journal/monde/liban_131106.edition=ls.html
PAYS DU CÈDRE Le Liban est de nouveau plongé dans une crise politique, provoquée par la mise en place d’un tribunal international sur l’affaire Hariri: cinq ministres chiites ont démissionné avec fracas.
GABY NASR BEYROUTH
Publié le 13 novembre 2006
EPA- ATTENTAT: L’assassinat de Rafic Hariri, le 14 février 2005, refait des vagues au Liban. La mise en place d’un tribunal international pour juger les auteurs de l’attaque contre l’ancien premier ministre, dans laquelle Syriens et Libanais sont mis en cause, a plongé hier le pays dans une nouvelle crise politique.
Coup de théâtre politique au Liban, où les ministres chiites viennent de claquer la porte du gouvernement. Leur démarche a suivi de peu l'échec du dernier round de concertations visant à former un cabinet d'union nationale, au sein duquel le Hezbollah, soutenu par Damas et Téhéran, entendait accroître son influence. Officiellement, les ministres chiites se plaignent d'être marginalisés à l'intérieur du gouvernement dominé par les forces anti-syriennes, mais leur départ a de plus en plus du mal à cacher des motifs beaucoup moins avouables.
Les frondeurs sont cinq sur vingt-quatre ministres: deux sont affiliés au Hezbollah, deux autres au mouvement modéré Amal du président du Parlement Nabih Berri. Le cinquième ministre chiite, celui des Affaires étrangères, est quant à lui proche du Hezbollah.
Les ministres démissionnaires accusent la majorité de ne pas vouloir partager le pouvoir et exigent d'avoir une minorité de blocage au sein du gouvernement. La majorité parlementaire ne veut pas en entendre parler. D'abord pour une question de principe parce qu'elle estime avoir largement remporté les élections de mai/juin 2005; ensuite parce qu'elle soupçonne ses détracteurs d'avoir un agenda caché, à savoir: torpiller la création par l'ONU d'un tribunal international, chargé de juger les assassins de l'ancien Premier ministre Rafic Hariri.
La dernière mouture du projet onusien vient d'ailleurs d'être soumise aux autorités libanaises. L'opposition, en disposant d'une minorité de blocage, serait en position d'empêcher la création de ce tribunal, qui doit être approuvée par le gouvernement. Certains responsables syriens et leurs alliés libanais ayant été mis en cause dans l'assassinat de Rafic Hariri par une commission de l'ONU, la majorité voit derrière la manœuvre du Hezbollah une tentative de protéger le régime de Damas et de ramener la Syrie sur la scène politique libanaise.
Dialogue interrompu
Comme pour confirmer ces appréhensions, le dialogue interlibanais s'était brusquement interrompu samedi lorsque le Premier ministre, Fouad Siniora, soutenu par la majorité anti-syrienne, a insisté pour soumettre dès lundi en conseil des ministres le projet final de l'ONU sur la création du tribunal international. Le chef de l'Etat, Émile Lahoud, un pro syrien notoire, a refusé de participer à la séance de lundi. Selon lui, «le gouvernement a perdu sa légitimité constitutionnelle et de ce fait, toute réunion du cabinet est anticonstitutionnelle et sans valeur». En tout état de cause, cette situation plonge le Liban dans un véritable casse-tête constitutionnel. Théoriquement, Fouad Siniora peut passer outre à la démission des ministres chiites, puisqu'il dispose en conseil des ministres de la majorité des deux tiers nécessaires à l'approbation du document onusien. Toutefois, dans une démocratie consensuelle à la libanaise, il ne peut continuer à gouverner sans la participation des représentants d'une des principales communautés du pays. Or les chiites constituent environ le tiers de la population libanaise et le Hezbollah et ses alliés du mouvement Amal monopolisent leur représentation politique. Sans oublier que l'influence du «parti de Dieu» s'est considérablement accrue à la suite de la guerre avec Israël l'été dernier.
Pour l'heure, le Premier ministre refuse d'accepter la démission des ministres chiites, mais il n'en reste pas moins que le Liban se retrouve plongé à nouveau dans une grave crise politique.
http://www.24heures.ch/vqhome/le_journal/monde/liban_131106.edition=ls.html
Dernière édition par le Lun 13 Nov - 14:21, édité 1 fois