Israël contre les non-Etats
Comme on le sait parfaitement, seule la création d’un Etat palestinien mettra fin aux conflits du Moyen Orient - et seules des pressions américaines vis-à-vis de l’entité sioniste permettront la création dudit Etat. C’est sur ce double axiome qu’a été basée la pensée “géopolitique” française de ces cinq ou six (ou trente) dernières années.
Autre sujet d’intérêt, plus récent, d’un certain nombre d’experts français, les “Etats faillis”, traduction de “failed state”, comme l’Afghanistan avant et pendant le règne des Talibans ou la Somalie aujourd’hui. Les failed states sont des endroits où règne une sorte d’anarchie qui peut receler des dangers pour les Etats occidentaux. S’il n’y a pas d’Etat pour répondre du comportement des résidents de ces endroits, ces derniers peuvent servir de base à des mouvements terroristes et il est difficile d’y faire quoi que ce soit.
Enfin, un troisième thème qui a été à la mode à Paris ces dernières années a été celui de la “prolifération étatique”. En fait, il s’agit surtout d’une expression inventée par l’immense Pascal Boniface qui a remarqué au début des années quatre-vingt dix qu’il y avait plus d’Etats qu’à l’époque où l’URSS existait. La raison de cette “prolifération étatique” était surtout la division en quinze parties de l’URSS, ce qui faisait quatorze Etats de plus, ainsi que l’apparition de l’Erythrée, la division en deux de la Tchécoslovaquie et peut-être quelques autres événements analogues. Boniface avait quand même remarqué que la souveraineté procurait toutes sortes d’avantages.
Tout cela étant posé, que faire quand on veut disposer d’une bonne base pour lancer des opérations terroristes tout en percevant des aides internationales ? Le plus simple est de créer un “Etat failli dirigé”. Un EFD est un territoire principalement régi par une autorité mais non reconnu comme un Etat et néanmoins protégé politiquement, dans une certaine mesure, contre les invasions.
Toujours à la pointe de l’innovation, les terroristes arabes ont créé à ce jour deux EFD aux frontières d’Israël : le Liban-Sud et la Bande de Gaza.
Il semble que lorsque Israël évacue un territoire, la réaction immédiate des gens qui en prennent le contrôle consiste non seulement à le transformer en camp d’entraînement géant pour kamikazes, mais aussi et surtout à le maintenir à l’écart du système interétatique. Le but du jeu semble être d’avoir les mains libres lorsqu’il s’agit d’attaquer et, lorsque les Israéliens contre-attaquent, de pouvoir utiliser qui on veut comme bouclier humain. Le Hamas et le Fatah utilisent propre population du territoire, comme c’est le cas depuis assez longtemps, tandis que le Hezbollah utilise le Liban, ce qui est à première vue encore plus efficace. Israël ne peut pas exiger du Liban ce qu’il ne peut pas faire, à savoir contrôler son propre territoire, et personne n’a très envie de le faire la place du Liban. Israël ne peut pas non plus contrôler le Liban-Sud lui-même, donc Israël ne peut rien faire.
En réalité, Israël va vraisemblablement pouvoir mener une opération d’une certaine envergure sans subir de trop fortes pressions internationales, mais il a probablement fallu pour cela que le Hezbollah surestime les avantages que lui procurait cette situation - à moins que ce mouvement ne soit capable de jouer plusieurs coups à l’avance et n’ait déjà anticipé une occupation israélienne qui tournerait à son avantage.
Mais même si Israël reprend le dessus et parvient à nettoyer plus ou moins durablement Gaza et le Liban Sud, la formule de l’”Etat failli dirigé” a peut-être un avenir.
D’abord, la communauté internationale et une vache à lait à qui on ne demande pas son avis avant de la traire. Un territoire anarchique et rempli de camps d’entraînement terroristes peut quand même assez facilement espérer toutes sortes d’aides internationales. Il suffit de montrer des enfants mourant de faim, et ce n’est pas ce qui manque quand on en a besoin.
Ensuite, les Occidentaux détestent mettre les pieds dans ces endroits et quand ils le font quand même, l’opération ne peut pas être répétée des dizaines de fois de toute façon. L’Afghanistan, l’Irak, le Kosovo coûtent déjà cher. La Somalie ne risque pas de faire l’objet d’un processus du même type pour le moment.
Enfin, le fait de ne pas être un Etat n’empêche pas de bénéficier des avantages dont bénéficient les Etats, comme la reconnaissance internationale ou l’accès à l’ONU. Les Palestiniens ont été parmi les premiers à bénéficier de ces avantages, ce qui fut également cas de quelques mouvements comme l’ANC ou la SWAPO. Il est vrai que c'’est l’OLP qui a bénéficié d’une sorte de reconnaissance diplomatique (la communauté internationale décrétant que l’OLP était le seul représentant légitime du peuple palestinien, de même que la SWAPO pour le “peuple namibien”, etc.), et pas la “Palestine”, mais la nuance échappe à la plupart des gens et ce n'’est pas forcément un problème pour le Hamas. Après tout, ce sont les représentants de l’OLP qui vont racketter les capitales européennes en expliquant aux dirigeants que s’ils ne donnent pas d’argent au gouvernement palestinien, alors la stabilité des territoires ne pourra pas être garantie et le terrorisme va reprendre. Les dissenssions internes sont très pratiques, finalement, et le Fatah et le Hamas seront toujours capables de se mettre d’accord ponctuellement, tant qu’il s’agira de faire front contre l’ennemi sioniste.
Donc Israël se retrouve face à des non-Etats qui lui font une guerre ouverte mais qui n’existent pas en tant que tels et sont par conséquent diplomatiquement plus ou moins invulnérables. Le Hezbollahstan, le Hamastan et le Fatahstan peuvent continuer à exister pendant assez longtemps sous la forme de domaines indépendants et contrôlés par des terroristes mafieux.
Israël étant un Etat occidental, il se considère soit en guerre, soit en paix, ou à la limite en “paix armée” avec ses voisins, mais il refuse l’espèce de situation intermédiaire de guerre de basse intensité perpétuelle qui est fréquente au Moyen Orient. Le Hamas et le Hezbollah, et surtout les médias occidentaux, ont sans doute du mal à comprendre cela. Israël ne pratique pas la vendetta mais cherche à neutraliser l’ennemi. C’est du moins la finalité de sa stratégie. Ses ennemis semblent capable de n’être ni en paix, ni en guerre, mais dans une sorte de situation intermédiaire dans laquelle on peut se battre tout en se parlant, et où un affront peut être lavé par un affront en sens inverse, un certain équilibre pouvant plus ou moins se trouver instauré de cette façon.
Donc Israël fait face à des entités antisionistes auxquelles ont ne peut jamais vraiment s’adresser directement, même amicalement, et qui ne font pas réellement la différence entre la paix et la guerre ; et on dirait que les évacuations israéliennes successives ont tendance à déboucher sur ce genre de situation. Il sera intéressant de voir comment nos experts vont analyser cela.
Saynomore
http://www.peres-fondateurs.com/~saynomore/?p=85
Comme on le sait parfaitement, seule la création d’un Etat palestinien mettra fin aux conflits du Moyen Orient - et seules des pressions américaines vis-à-vis de l’entité sioniste permettront la création dudit Etat. C’est sur ce double axiome qu’a été basée la pensée “géopolitique” française de ces cinq ou six (ou trente) dernières années.
Autre sujet d’intérêt, plus récent, d’un certain nombre d’experts français, les “Etats faillis”, traduction de “failed state”, comme l’Afghanistan avant et pendant le règne des Talibans ou la Somalie aujourd’hui. Les failed states sont des endroits où règne une sorte d’anarchie qui peut receler des dangers pour les Etats occidentaux. S’il n’y a pas d’Etat pour répondre du comportement des résidents de ces endroits, ces derniers peuvent servir de base à des mouvements terroristes et il est difficile d’y faire quoi que ce soit.
Enfin, un troisième thème qui a été à la mode à Paris ces dernières années a été celui de la “prolifération étatique”. En fait, il s’agit surtout d’une expression inventée par l’immense Pascal Boniface qui a remarqué au début des années quatre-vingt dix qu’il y avait plus d’Etats qu’à l’époque où l’URSS existait. La raison de cette “prolifération étatique” était surtout la division en quinze parties de l’URSS, ce qui faisait quatorze Etats de plus, ainsi que l’apparition de l’Erythrée, la division en deux de la Tchécoslovaquie et peut-être quelques autres événements analogues. Boniface avait quand même remarqué que la souveraineté procurait toutes sortes d’avantages.
Tout cela étant posé, que faire quand on veut disposer d’une bonne base pour lancer des opérations terroristes tout en percevant des aides internationales ? Le plus simple est de créer un “Etat failli dirigé”. Un EFD est un territoire principalement régi par une autorité mais non reconnu comme un Etat et néanmoins protégé politiquement, dans une certaine mesure, contre les invasions.
Toujours à la pointe de l’innovation, les terroristes arabes ont créé à ce jour deux EFD aux frontières d’Israël : le Liban-Sud et la Bande de Gaza.
Il semble que lorsque Israël évacue un territoire, la réaction immédiate des gens qui en prennent le contrôle consiste non seulement à le transformer en camp d’entraînement géant pour kamikazes, mais aussi et surtout à le maintenir à l’écart du système interétatique. Le but du jeu semble être d’avoir les mains libres lorsqu’il s’agit d’attaquer et, lorsque les Israéliens contre-attaquent, de pouvoir utiliser qui on veut comme bouclier humain. Le Hamas et le Fatah utilisent propre population du territoire, comme c’est le cas depuis assez longtemps, tandis que le Hezbollah utilise le Liban, ce qui est à première vue encore plus efficace. Israël ne peut pas exiger du Liban ce qu’il ne peut pas faire, à savoir contrôler son propre territoire, et personne n’a très envie de le faire la place du Liban. Israël ne peut pas non plus contrôler le Liban-Sud lui-même, donc Israël ne peut rien faire.
En réalité, Israël va vraisemblablement pouvoir mener une opération d’une certaine envergure sans subir de trop fortes pressions internationales, mais il a probablement fallu pour cela que le Hezbollah surestime les avantages que lui procurait cette situation - à moins que ce mouvement ne soit capable de jouer plusieurs coups à l’avance et n’ait déjà anticipé une occupation israélienne qui tournerait à son avantage.
Mais même si Israël reprend le dessus et parvient à nettoyer plus ou moins durablement Gaza et le Liban Sud, la formule de l’”Etat failli dirigé” a peut-être un avenir.
D’abord, la communauté internationale et une vache à lait à qui on ne demande pas son avis avant de la traire. Un territoire anarchique et rempli de camps d’entraînement terroristes peut quand même assez facilement espérer toutes sortes d’aides internationales. Il suffit de montrer des enfants mourant de faim, et ce n’est pas ce qui manque quand on en a besoin.
Ensuite, les Occidentaux détestent mettre les pieds dans ces endroits et quand ils le font quand même, l’opération ne peut pas être répétée des dizaines de fois de toute façon. L’Afghanistan, l’Irak, le Kosovo coûtent déjà cher. La Somalie ne risque pas de faire l’objet d’un processus du même type pour le moment.
Enfin, le fait de ne pas être un Etat n’empêche pas de bénéficier des avantages dont bénéficient les Etats, comme la reconnaissance internationale ou l’accès à l’ONU. Les Palestiniens ont été parmi les premiers à bénéficier de ces avantages, ce qui fut également cas de quelques mouvements comme l’ANC ou la SWAPO. Il est vrai que c'’est l’OLP qui a bénéficié d’une sorte de reconnaissance diplomatique (la communauté internationale décrétant que l’OLP était le seul représentant légitime du peuple palestinien, de même que la SWAPO pour le “peuple namibien”, etc.), et pas la “Palestine”, mais la nuance échappe à la plupart des gens et ce n'’est pas forcément un problème pour le Hamas. Après tout, ce sont les représentants de l’OLP qui vont racketter les capitales européennes en expliquant aux dirigeants que s’ils ne donnent pas d’argent au gouvernement palestinien, alors la stabilité des territoires ne pourra pas être garantie et le terrorisme va reprendre. Les dissenssions internes sont très pratiques, finalement, et le Fatah et le Hamas seront toujours capables de se mettre d’accord ponctuellement, tant qu’il s’agira de faire front contre l’ennemi sioniste.
Donc Israël se retrouve face à des non-Etats qui lui font une guerre ouverte mais qui n’existent pas en tant que tels et sont par conséquent diplomatiquement plus ou moins invulnérables. Le Hezbollahstan, le Hamastan et le Fatahstan peuvent continuer à exister pendant assez longtemps sous la forme de domaines indépendants et contrôlés par des terroristes mafieux.
Israël étant un Etat occidental, il se considère soit en guerre, soit en paix, ou à la limite en “paix armée” avec ses voisins, mais il refuse l’espèce de situation intermédiaire de guerre de basse intensité perpétuelle qui est fréquente au Moyen Orient. Le Hamas et le Hezbollah, et surtout les médias occidentaux, ont sans doute du mal à comprendre cela. Israël ne pratique pas la vendetta mais cherche à neutraliser l’ennemi. C’est du moins la finalité de sa stratégie. Ses ennemis semblent capable de n’être ni en paix, ni en guerre, mais dans une sorte de situation intermédiaire dans laquelle on peut se battre tout en se parlant, et où un affront peut être lavé par un affront en sens inverse, un certain équilibre pouvant plus ou moins se trouver instauré de cette façon.
Donc Israël fait face à des entités antisionistes auxquelles ont ne peut jamais vraiment s’adresser directement, même amicalement, et qui ne font pas réellement la différence entre la paix et la guerre ; et on dirait que les évacuations israéliennes successives ont tendance à déboucher sur ce genre de situation. Il sera intéressant de voir comment nos experts vont analyser cela.
Saynomore
http://www.peres-fondateurs.com/~saynomore/?p=85