Ashkan Dejagah, désespoir du foot allemand
FOOT. D’origine iranienne, le joueur allemand refuse un déplacement en Israël.
Par NATHALIE VERSIEUX
QUOTIDIEN : vendredi 12 octobre 2007
Berlin de notre correspondant
Jusqu’ici, le nom d’Ashkan Dejagah figurait généralement dans les pages sportives des quotidiens allemands. Depuis que ce footballeur d’origine iranienne a refusé de participer au match qui opposera aujourd’hui à Tel-Aviv l’équipe d’Allemagne Espoirs à son homologue israélienne, son nom a rejoint la sphère politique… «L’affaire» Dejagah a pris en quelques jours des proportions imprévues. Il avait invoqué la semaine dernière des «raisons très personnelles» pour motiver son refus - accepté par l’entraîneur de l’équipe, Dieter Eilts - de participer au match qualificatif pour l’Euro 2009 Espoirs. Depuis, Dejagah a multiplié les déclarations laissant entendre que sa décision pourrait être motivée par des raisons politiques. L’Iran ne reconnaît pas l’existence d’Israël depuis 1979 et interdit à ses ressortissants de se rendre dans l’Etat hébreu, même s’il s’agit d’y disputer des épreuves sportives. Plusieurs membres de la famille d’Ashkan Dejagah, notamment son frère Ardeshir, footballeur professionnel de l’équipe Paykan Téhéran, vivent en Iran. Le joueur craindrait également, selon son entourage, de ne plus pouvoir retourner chaque année dans son pays natal s’il jouait en Israël.
Option. «Ashkan Dejagah est un exemple parfait d’intégration ratée, tranche le quotidien de centre gauche Süddeutsche Zeitung. Ce que le joueur redoute, ce ne sont pas le régime de Téhéran et de possibles représailles à l’encontre de sa famille, mais son père, à Berlin. Mohammad Dejagah n’en fait pas un secret : il aurait préféré voir son fils porter le maillot de l’équipe iranienne plutôt que celui de l’équipe d’Allemagne…» Cette option n’est pourtant plus envisageable : le règlement de la Fifa interdit à un joueur de plus de 21 ans de changer de nationalité sportive.
Ashkan Dejagah possède les deux nationalités, allemande et iranienne. Né à Téhéran, il a grandi à Berlin. «J’ai plus de sang iranien qu’allemand dans les veines», prétend-il. Ses performances au sein du VFL Wolfsburg depuis l’été dernier en font l’un des meilleurs espoirs de l’équipe d’Allemagne. Mais sa place est-elle bien là ? se demandent aujourd’hui la Fédération allemande de football (DFB), la presse, le Conseil central des Juifs d’Allemagne et jusqu’aux grands partis SPD et CDU.
Le Conseil central des Juifs d’Allemagne, particulièrement virulent, réclame l’exclusion du joueur : «Il est inacceptable qu’un joueur de l’équipe nationale décide à titre privé de boycotter les Juifs. En tant que joueur de l’équipe nationale, Dejagah représente l’Allemagne, qui ne peut tolérer le moindre comportement hostile à l’égard d’Israël», insiste la présidente de l’association, Charlotte Knobloch.
«Un joueur qui porte notre maillot doit s’identifier à notre pays et à ses valeurs», renchérit le président du DFB. Theo Zwanziger sera sur place ce soir à Tel-Aviv. Auparavant, il aura déposé une gerbe au monument Yad Vashem à la mémoire des victimes de l’Holocauste.
L’avenir de Dejagah en Allemagne semble aujourd’hui compromis, même s’il a assuré être disponible pour le match retour, à Hanovre. Il en faudra plus pour convaincre le DFB. Theo Zwanziger a convoqué le joueur à un entretien - la semaine prochaine - qui devrait sceller son sort en équipe d’Allemagne. En attendant, Dejagah a déjà été sanctionné par Wolfsburg. Il n’a pas pu s’entraîner avant-hier. Le patron de Volkswagen, le sponsor du club, se serait personnellement engagé en faveur de cette sanction.
Les seuls réactions positives à la position de Dejagah viennent de la presse iranienne et sont abondamment rapportées par les médias allemands : le journal sportif iranien Goal a qualifié le choix du joueur d’ «héroïque » tout en s’en prenant une fois de plus au «lobby juif allemand, responsable de la vague de protestations qui ont accompagné l’exemplaire décision de Dejagah».
http://www.liberation.fr/actualite/sports/284155.FR.php
FOOT. D’origine iranienne, le joueur allemand refuse un déplacement en Israël.
Par NATHALIE VERSIEUX
QUOTIDIEN : vendredi 12 octobre 2007
Berlin de notre correspondant
Jusqu’ici, le nom d’Ashkan Dejagah figurait généralement dans les pages sportives des quotidiens allemands. Depuis que ce footballeur d’origine iranienne a refusé de participer au match qui opposera aujourd’hui à Tel-Aviv l’équipe d’Allemagne Espoirs à son homologue israélienne, son nom a rejoint la sphère politique… «L’affaire» Dejagah a pris en quelques jours des proportions imprévues. Il avait invoqué la semaine dernière des «raisons très personnelles» pour motiver son refus - accepté par l’entraîneur de l’équipe, Dieter Eilts - de participer au match qualificatif pour l’Euro 2009 Espoirs. Depuis, Dejagah a multiplié les déclarations laissant entendre que sa décision pourrait être motivée par des raisons politiques. L’Iran ne reconnaît pas l’existence d’Israël depuis 1979 et interdit à ses ressortissants de se rendre dans l’Etat hébreu, même s’il s’agit d’y disputer des épreuves sportives. Plusieurs membres de la famille d’Ashkan Dejagah, notamment son frère Ardeshir, footballeur professionnel de l’équipe Paykan Téhéran, vivent en Iran. Le joueur craindrait également, selon son entourage, de ne plus pouvoir retourner chaque année dans son pays natal s’il jouait en Israël.
Option. «Ashkan Dejagah est un exemple parfait d’intégration ratée, tranche le quotidien de centre gauche Süddeutsche Zeitung. Ce que le joueur redoute, ce ne sont pas le régime de Téhéran et de possibles représailles à l’encontre de sa famille, mais son père, à Berlin. Mohammad Dejagah n’en fait pas un secret : il aurait préféré voir son fils porter le maillot de l’équipe iranienne plutôt que celui de l’équipe d’Allemagne…» Cette option n’est pourtant plus envisageable : le règlement de la Fifa interdit à un joueur de plus de 21 ans de changer de nationalité sportive.
Ashkan Dejagah possède les deux nationalités, allemande et iranienne. Né à Téhéran, il a grandi à Berlin. «J’ai plus de sang iranien qu’allemand dans les veines», prétend-il. Ses performances au sein du VFL Wolfsburg depuis l’été dernier en font l’un des meilleurs espoirs de l’équipe d’Allemagne. Mais sa place est-elle bien là ? se demandent aujourd’hui la Fédération allemande de football (DFB), la presse, le Conseil central des Juifs d’Allemagne et jusqu’aux grands partis SPD et CDU.
Le Conseil central des Juifs d’Allemagne, particulièrement virulent, réclame l’exclusion du joueur : «Il est inacceptable qu’un joueur de l’équipe nationale décide à titre privé de boycotter les Juifs. En tant que joueur de l’équipe nationale, Dejagah représente l’Allemagne, qui ne peut tolérer le moindre comportement hostile à l’égard d’Israël», insiste la présidente de l’association, Charlotte Knobloch.
«Un joueur qui porte notre maillot doit s’identifier à notre pays et à ses valeurs», renchérit le président du DFB. Theo Zwanziger sera sur place ce soir à Tel-Aviv. Auparavant, il aura déposé une gerbe au monument Yad Vashem à la mémoire des victimes de l’Holocauste.
L’avenir de Dejagah en Allemagne semble aujourd’hui compromis, même s’il a assuré être disponible pour le match retour, à Hanovre. Il en faudra plus pour convaincre le DFB. Theo Zwanziger a convoqué le joueur à un entretien - la semaine prochaine - qui devrait sceller son sort en équipe d’Allemagne. En attendant, Dejagah a déjà été sanctionné par Wolfsburg. Il n’a pas pu s’entraîner avant-hier. Le patron de Volkswagen, le sponsor du club, se serait personnellement engagé en faveur de cette sanction.
Les seuls réactions positives à la position de Dejagah viennent de la presse iranienne et sont abondamment rapportées par les médias allemands : le journal sportif iranien Goal a qualifié le choix du joueur d’ «héroïque » tout en s’en prenant une fois de plus au «lobby juif allemand, responsable de la vague de protestations qui ont accompagné l’exemplaire décision de Dejagah».
http://www.liberation.fr/actualite/sports/284155.FR.php